Salut, c'est François!
De retour à Tokyo, on avait pour but de faire certains quartiers que notre première visite ne nous avait pas permis de couvrir. Au menu: l'éclectique Asakusa, le tranquille Ueno, le traditionnel Yanaka, le geek Akihabara et le sumo Ryogoku!
On a d'abord marché vers le coeur d'Asakusa, le quartier de notre hostel: le temple Senso-ji. Immense temple shinto caché derrière d'énormes lanternes, ce sanctuaire urbain rouge vif est situé à la fin d'une longue allée de boutiques de souvenirs bien agréable à visiter. On y a croisé un bon nombre de touristes chinois âgés! Une bien belle visite, qu'on a complétée par une balade dans Asakusa. On trouve de tout dans ce quartier marchand, notamment un magasin génial qui vend tout ce qui peut possiblement exister, de la bouffe à l'électronique aux cosmétiques en passant par les jouets érotiques! Chez Don Quijote, on est d'abord accueillis par un immense aquarium plein de poissons multicolores, puis on prend un plaisir fasciné à voir tout ce qui peut être en vente! Un must de Tokyo, définitivement!
Après un bref arrêt dans un resto de dumplings pour nourrir l'estomac gargouillant de Mémé, on a quitté Asakusa à pied pour le quartier voisin de Ueno. À côté de la gare de Ueno, centre névralgique du quartier, on trouve un très grand parc dont l'ombre était très appréciée par cette journée chaude et ensoleillée. Le parc était bien, mais on en avait vu des mieux ailleurs (même si le Lonely Planet en faisait un hit de Tokyo!). On y a vu deux groupes péruviens qui s'affrontaient des deux côtés de la place centrale de la ville à coup de musique andine et on a quitté le parc en sifflotant "El Condor pasa"! Mondialisation, quelqu'un? :)
Ensuite, direction Yanaka! Yanaka est une partie de Tokyo qui a miraculeusement survécu aux tremblements de terre et aux bombardements du siècle dernier. Résultat: on y trouve encore beaucoup de petits temples, de cimetières de quartier et de vieilles demeures, parsemés au hasard de petites allées. Malgré tout, ça demeure entrecoupés de nouvelles constructions, donc ça enlève un peu au charme. Une marche agréable sans être inoubliable, mais qui nous montre une facette du Tokyo traditionnel qu'on imagine plus à Kyoto ou dans un village de campagne que dans la mégalopole japonaise! Au pied de l'escalier des chats errants du quartier (malheureusement, il n'y en avait aucun lors de notre passage, probablement en raison du chaud soleil de midi), on a mangé un chou à la crème au thé vert dans une pâte au riz. Intéressant, mais on en prendrait pas tout plein! On a visité la rue marchande de Yanaka, avec ses petits étals et ses boutiques de bouffe et de gogosses, avant de prendre le train vers le centre de la ville.
À la sortie de la gare de Tokyo (où Mémé a fait une belle démonstration de la danse du bacon en tentant d'éviter des passagers), on s'est dirigés vers un grand magasin de vêtements que le guide recommandait et sur lequel Mémé avait jeté son dévolu. C'était un genre de Ikea avec du linge, mais finalement rien n'a fait le bonheur de Mémé. Comme on était dans le quartier, on en a profité pour visiter les jardins de la cité impériale. Ils étaient bien beaux, avec les vestiges des murailles en plus, mais ceux de Kanazawa étaient encore plus frappants! Peut-être nos standards sont-ils rendus plus élevés après 2 semaines au Japon, à voir des jardins et des temples en série?
En revenant, on s'est dirigés vers le quartier Akihabara, le quartier des otakus (geek) de Tokyo. C'est l'épicentre de la sous-culture des mangas, du cosplay et des jeux vidéos qui caractérise une partie du Japon contemporain. Tapageur, le quartier est saturé de néons et tapissé d'affiches de héros de mangas (en fait surtout d'héroïnes sexy)! On est entrés dans quelques magasins: on y vend des figurines de mangas, des dvds de mangas, des mangas tout courts... Quand ce n'est pas directement des machines style arcades qui permettent de gagner des figurines! Parlant d'arcades, certains étages leur sont entièrement consacrés, freaks de Dance Dance Revolution et autres patentes du même genre en prime! Naturellement, le tout ne serait pas complet sans de nombreux magasins d'électronique! Et qui dit geek-qui-passe-sa-vie-devant-l'ordi dit aussi (au Japon) ramen, avec tout plein de restos de nouilles pour les gamers! Un quartier fascinant dans sa geekitude avouée, mais il faut vraiment un fan pour l'adorer disons!
Néanmoins, le clou du quartier et son aspect le plus bizarre sont les maid cafés. Un maid café, c'est un endroit où de jeunes filles déguisées en femmes de chambre accueillent les clients (surtout des gars) avec tout le cute possible, chantent des chansons et servent des desserts mignons en forme de chat. Vous voyez le genre! Bref, c'est censé être l'apothéose du kawaii (mignon) mélangé avec le cosplay! Je trouvais qu'il pouvait être amusant d'y faire un tour, mais en fait... l'atmosphère est un peu déprimante plutôt que bon enfant! On a fait un tour dans un maid café après avoir hésité sur le prix (c'est quand même assez cher) et on est à peine restés 5 minutes. D'abord, l'endroit était presque vide: les 2 autres clients étaient des Japonais à l'air déprimé, qui avaient l'air de tromper l'ennui et la solitude ici en compagnie de jolies filles... Ensuite, l'ambiance rappelait davantage celle, un peu glauque, bizarre et lubrique, d'un bar de danseuses... Et on s'est rendus compte que les maid café, c'est un peu ça dans le fond: des clients seuls, qui sous le couvert du "cute" zieutent des filles en buvant une consommation trop chère dans un lieu vaguement mal famé. On était loin de l'atmosphère comico-bizarroide que j'espérais (bon, on était mercredi pm, c'était peut-être pas le meilleur moment, mais tout de même!)...
Après cette expérience, on s'est éloignés un peu pour manger un set lunch dans un supermarché. Les supermarchés japonais proposent souvent, à bas prix, des plats préparés très bons, notamment des sushis! On a ensuite quitté les aspects particuliers de la culture pop japonaise pour ceux de la culture traditionnelle japonaise. En débarquant dans le quartier Ryogoku, on tombe d'abord sur le stade de sumo de la ville, orné de grandes fresques d'obèses en couche (ça a vraiment l'air de ça) s'affrontant devant un public ravi. On aurait bien voulu voir un combat ou à tout le moins une pratique, mais on s'est renseignés et il n'y en avait pas lors de notre passage... Ensuite, on a traversé un joli jardin où des écoliers s'amusaient à taquiner des tortues, puis on a marché le long de la rivière Sumida qui traverse Tokyo. On est enfin revenus à l'hostel par le quartier Asakusa.
À l'auberge, on a fraternisé avec deux Australiens (encore! il y en a partout ici!), un Brésilien qui parlait français (Pedro), une Allemande geek et un étrange Coréen. C'était le free drinks night à l'hostel et on a pu déguster du saké et du vin de prune (miam) gratuits, avec quelques craquelins japonais typiques! C'était très agréable, et on a prolongé le plaisir en allant souper avec le Brésilien avec lequel on s'entendait très bien. On a mangé dans un petit resto de crêpes japonaises. En fait, il s'agit de nouilles, de chou, d'oeufs, de porc et de sauce teryaki sur une crêpe, c'est très bon! En revenant à l'hostel, on a terminé la soirée en jasant à tout le monde avant d'aller dormir!
Avant de vous quitter, un petit aparté sur les touristes qu'on croise au Japon. Contrairement à l'Amérique du Sud où on ne croisait que de jeunes backpackers, ou à l'Asie centrale où on ne croisait que des gens un peu ou beaucoup fous (du genre "je me rends en Australie à vélo à partir de la Suède", "je suis une femme et je compte visiter l'Afghanistan en touriste", "j'ai visité la Syrie et la Somalie dernièrement" ou "les zones tribales du Pakistan gagnent à être connues"), le Japon accueille des types plus variés de visiteurs. En voici quelques exemples qui peuvent se recouper:
- Les familles avec de jeunes (ou moins jeunes) enfants: preuve que le Japon est très sécuritaire et facile à voyager, tout en étant dépaysant;
- Les personnes âgées en voyage de groupe, caméra à 10 000$ au cou: voir commentaire ci-haut
- Les groupes de Chinois, jeunes ou vieux (surtout vieux): parce que c'est proche (et aussi parce qu'ils aiment être en groupe);
- Les backpackers normaux qui font attention à leur budget (i.e. nous, mettons);
- Les backpackers des pays sécuritaires à budget de type "yolo". Se subdivise en 2 types: le raffiné (i.e. ceux qui font le tour de l'Europe ou des États-Unis, qui mangent dans de bons restos, trouvent que c'est un bargain qu'on demande 35$ pour un lit en dortoir et paient sans rechigner les droits d'accès élevés aux musées, temples et autres attractions) et le fêtard (i.e. ceux qui n'ont pas peur de dépenser des fortunes en bières et en sortent tous les soirs). On croise ce type de backpacker également dans les pays plus funky, mais en moins grand nombre;
- Le backpacker insécure ou trop prudent: propre au Japon, ce type de voyageur a un jour osé venir au Japon et revisite depuis, généralement pour la Xe fois, les mêmes villes japonaises. Sa zone de confort est très circonscrite et il trouve aventureux ceux qui s'éloignent un tant soit peu des grands circuits touristiques. Aurait de la difficulté à survivre ailleurs que dans un environnement aussi confortable que celui du Japon;
- Le backpacker qui préfère la valise encombrante et lourde au sac à dos: étonnamment nombreux, sans qu'on sache vraiment pourquoi;
- Le geek (i.e. le ou la fan de mangas, qui a appris le japonais en écoutant des anime. Fan de cosplay, vient au Japon pour assouvir ses passions. N'en est généralement pas à sa première visite, ou alors planifie déjà de revenir. On le trouve à Akihabara, dans des bars de karaoké à chanter des chansons qu'il connait déjà par coeur, ou sur des photos où il fait le signe de peace);
- Le voyageur d'affaires: profite d'un congrès à Tokyo pour visiter le Japon;
- Les Australiens: constituent au moins le tiers de tous les backpackers qu'on a rencontrés;
- Les Français: ils sont partout, et le Japon ne fait pas exception;
- Enfin, quelques bibittes étranges, comme ce métalleux à l'identité sexuelle incertaine qui partageait mon dortoir à Tokyo. Difficile de dire ce qu'ils font là, mais ponctuent le paysage de leur présence!
Et puis pour terminer, quelques impressions générales sur le Japon après 2 semaines de voyage:
- Le Japon est probablement la civilisation la plus raffinée du monde. À tout le moins, de tous les pays que j'ai pu visiter jusqu'à aujourd'hui. La culture japonaise a été empruntée en bonne partie à la Chine (la puissance dominante il y a 1200 ans, quand le Japon a été unifié) et a été adaptée au fil du temps à la sauce japonaise, tout en étant indéniablement influencée par l'Occident (Europe d'abord, États-Unis ensuite). On est frappé par l'extrême souci de la propreté, de la politesse, de l'amabilité, du bien-être, de l'harmonie sociale et du détail en général. À titre d'exemple, les rues sont impeccables, même s'il n'y a pas de poubelles: les gens jettent leurs déchets chez eux! On note rapidement l'organisation méticuleuse de tous les aspects de la vie quotidienne. La culture est riche et bouillonnante, en constante évolution tout en ne reniant pas le passé. Illustration parmi d'autres de ce qui précède, la cuisine est exquise et incroyablement diversifiée.
- Le Japonais typique suit consciencieusement et sans protester les règles écrites et non-écrites qui régissent la complexe société japonaise. À titre d'exemple, tout le monde fait la file pour entrer dans le métro. On demande aux usagers du métro de s'abstenir de parler au téléphone: personne ne le fait. Encore plus qu'en Chine, le collectif prime sur l'individualisme au nom du maintien de l'harmonie sociale, bien qu'il existe des exceptions. Même les écarts à la norme semblent codifiés! Par exemple, le businessman saoul dans le métro le soir va tituber, dormir sur son banc, balbutier, voire vomir dans un coin, mais ne dérangera personne en se battant, en hurlant ou causant du grabuge, comme ça pourrait être le cas en Occident...
-Impossible de ne pas percevoir non plus la fascination des Japonais pour l'Occident, qui se traduit par leur amour du français (qui semble être pour eux la "langue du raffinement" affichée à toutes les sauces sur les boutiques) ou encore l'adoption des coutumes américaines comme nulle part ailleurs (baseball, notamment). Le standard de beauté japonais est également très clairement axé sur une peau plus blanche, des yeux moins bridés (voir les pubs visant le public féminin et les mangas en général)....
Le mont Fuji et la fin du voyage pour bientôt!
Oh, combien je me régale en vous lisant!
RépondreSupprimer"Le professeur me découvrit en train de méditer au milieu des geishas du parc Ueno, au cœur de Tokio. Mon coolie de pousse-pousse était assis à mes côtés, en train de boire du thé dans la plus délicate des porcelaines, et de manger des macarons. Je pensais à l’âne de Sterne et souriais béatement en plein azur, là-haut, au-dessus des arbres."
Lettres du Japon, de Rudyard Kipling, 1889
"- Ah mais volontiers, dit Kakuro en se saisissant d’une chaise. Et, apercevant Léon : Oh, le beau morceau! Je ne l’avais pas bien vu l’autre fois. On dirait un sumo!"
RépondreSupprimerL'élégance du hérisson de Muriel Barbery 2006 Gallimard
Je vous laisse deviner qui est Léon. K
" - Et comment! Elle m'avait préparé la meilleure spécialité de cuisine française de l'univers.[…]
RépondreSupprimer- Cela portait un nom étrange. Je n'en ai jamais remangé depuis. Une délicatesse! Au fond d'un grand plat ta sœur avait disposé diverses viandes hachées mêlées d'oignons. Au-dessus, elle avait étalé une purée de pommes de terre qu'elle avait pressée elle-même, ce qui était étonnant pour une si frêle créature. Le tout gratiné au four.
Il ferme les yeux avec recueillement.
- Du hachis parmentier, dis-je.
- Oui! Quel raffinement!" La nostalgie heureuse d'Amélie Nothomb 2013